22 septembre 2010
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Mon quatrième retour en Kabylie (26)
Alors que ma rencontre avec Ali touche à sa fin,
un homme du village passant par là vient se mêler à la discussion. Certains aspects de sa personne m'autorisent à penser qu'il adhère fortement à l'Islam et ses préceptes. La conversation entre lui, religieux, et mes amis, plutôt laïcs et démocrates, ne tarde pas à devenir orageuse.
Très gêné d'assister à la joute verbale ponctuée de sourates, versets, hadiths etc. je finis par rejoindre ceux qui, assis sur les tombes, se sont tenus à l'écart de toute polémique.
Ce genre d'incident m'interroge sur l'avenir de cette province traditionnellement tolérante, aujourd'hui menacée par un fléau dévastateur : l'intégrisme. J'ai de bonnes raisons de croire que le ver est dans le fruit.
Il est déjà tard et Mohand me propose de visiter le chantier de sa future maison. Je suis agréablement surpris car mon hôte a bon goût. Il a su s'entourer d'un maçon parfaitement qualifié à qui il fait totalement confiance.
J'adore les balcons donnant sur le Djurdjura qu'il pourra contempler à loisir avec son épouse et ses enfants. J'aime aussi le jardin déjà planté d'arbres fruitiers de toutes sortes, en attente de légumes et de fleurs dont la gent féminine s'occupera avec le plus grand soin.
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21 septembre 2010
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Mon quatrième retour en Kabylie (25)
Après avoir quitté Smaïl, nous empruntons le chemin qui conduit au village tout proche : Taourirt Abdallah.
C'est là que j'apprends que la personne que je cherche est absente. Pas besoin de m'indiquer le lieu où il se trouve, je le devine. Sûrement assis sur une tombe, près de l'ancienne école, en train de discuter ou de rêvasser, absorbé dans ses pensées, dans une contemplation infinie de son univers ensoleillé. Cet endroit est son lieu de prédilection, il y passe beaucoup de temps depuis qu'il est à la retraite.
Il est là en effet, avec d'autres villageois dont l'un d'entre eux (à gauche sur la photo) me connaît bien puisqu'on se rencontre souvent à la fête annuelle des Iwadiyen de France à Paris.
Ali M , puisque de lui il s'agit, est mon ancien cuisinier chez les Pères. C'est un homme charmant. Pendant les deux ans que nous avons passés ensemble, il m'a accompagné de sa douceur et de sa simplicité, a agrémenté mes repas de son savoir-faire culinaire.
Ali au centre de la photo
Nous avons même fait, un jour de 1973, une sortie en forêt de Yakouren pour voir Nouara et Hassan Abassi chanter lors d'une sortie étudiante. Récemment, il m'a permis en me donnant l'hospitalité pour une nuit d'assister entièrement à la préparation et au déroulement de la fête de Sidi Rabeh. Qu'il en soit remercié.
N'est-ce pas Ali, nous avons vécu de bons moments ensemble ! Tu as sûrement encore quelque part dans ton coeur cet établissement où nos chemins par la grâce de Dieu se sont croisés.
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20 septembre 2010
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Mon quatrième retour en Kabylie (24)
Alors que nous nous rapprochons de Tighilt, je regarde pour la énième fois en contrebas l'école d'Issly Moussi.
Cette école primaire était en construction quand j'ai fermé l'école des Pères Blancs en 1973. Elle en assume le remplacement jusqu'à présent.
Mon élève Hacène H , devenu à son tour instituteur, y a enseigné de nombreuses années jusqu'à ces derniers temps. Dès le début, il avait eu à coeur de réinstaller à Issly Moussi la fameuse cloche des Pères qui avait tant de fois rythmé ses journées scolaires. Un symbole qu'il ne voulait pas voir disparaître comme cela a été le cas pour le reste. C'est cette même cloche qui m'accueillera lors de mon retour en mai 2007. Qu'il en soit honoré.
A Tighilt, je remarque que quelques tombes d'Aït Abdelkrim sont joliment fleuries
et c'est sur cette dernière image que je prends congé de Smaïl. Dans mon "au revoir", je le remercie de m'avoir, par sa disponibilité et sa gentillesse, fait voyager dans le passé et dans le présent, en attendant un avenir qui s'annonce plus qu'incertain.
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19 septembre 2010
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Mon quatrième retour en Kabylie (23)
Nous nous dirigeons vers Tighilt par le sentier qui longe AÏt Abdelkrim, une sorte de "chemin de ronde" qui évite de passer à travers le village. Selon le droit coutumier ancestral, tout étranger à un village et qui n'a rien à y faire ou y demander doit emprunter la voie qui contourne le village. Je ne sais si cette obligation est encore d'actualité.
Voyant que je traîne un peu les pieds, Smaïl se retourne mais ne s'inquiète pas.
Il sait que je prends des photos et encore des photos. Je m'intéresse à tout, aussi bien à l'architecture qu'à la nature, même si celle-ci est outrageusement offensée par des tas d'ordures à ciel ouvert. Mais cela, je ne vous le montrerai pas, je ne veux garder dans ma mémoire que des clichés où mon âme est en paix avec la beauté naturelle des sites. Je ne me voile pas la face (ça, ce serait drôle par les temps qui courent !) mais par pudeur, respect des gens, sentimentalité, je n'ai aucune envie de jeter de l'huile sur le feu.
Je me contente d'immortaliser ces petites choses qui sont belles quand on sait les voir avec amour , ces détails qui font le quotidien du Kabyle qui vit dans cet univers auquel il demeurera attaché jusqu'à sa mort.
Ouvrez les volets de votre esprit, faites entrer la lumière dans votre coeur et admirez, respirez, sentez, imaginez......
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18 septembre 2010
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Mon quatrième retour en Kabylie (22)
Nous quittons la salle des fêtes d'Aït Chellala, Smaïl désire nous raccompagner jusqu'à Tighilt.
Je laisse mes compagnons bavarder tout en marchant et j'en profite pour effectuer quelques clichés des environs que je connais depuis belle lurette mais je ne peux m'en empêcher.
Taourirt Abdallah à gauche, Aït Berdjal à droite
AÏt Berdjal au centre, Aït Hellal dans l'encadrement de la fenêtre
idem (le Djurdjura au loin dans la brume)
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17 septembre 2010
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Mon quatrième retour en Kabylie (21)
Mohand, mon chauffeur, appelle Smaïl L. pour l'informer de ma présence dont il ne se doute absolument pas. J'aime bien faire des surprises, elles n'en sont que plus sucrées quand elles sont bonnes.
Il nous rejoint joyeusement et le plaisir est partagé.
Smaïl est d'une nature simple, rurale, montagnarde. Sa bonhommie est à la mesure de sa générosité. Lors de la fête de mes retrouvailles le 11 mai 2007 avec une cinquantaine de mes élèves qui ne m'avaient pas revu depuis plus de 30 ans, il a offert le couscous à tout le monde. C'est un geste que personnellement je ne suis pas prêt d'oublier. Merci Smaïl.
Je ne sais si officiellement il est reconnu comme le chef de son village, mais je sais qu'il joue ce rôle à merveille. Il aime sa Kabylie et son village par-dessus tout. Il donne beaucoup de son temps pour l'animer, le moderniser, le transformer pour le bien de tous.
Il désire me montrer quelque chose, il nous emmène donc à son village. Je devine un peu de quoi il s'agit.
la salle des fêtes à gauche, le mausolée Cheikh el Mançour à droite
Arrivé sur place, je découvre la nouvelle construction jouxtant le mausolée du saint protecteur "Cheikh el Mançour". J'en avais vu les prémices en octobre 2008 lorsque les maçons en préparaient les fondations. Aujourd'hui la construction est pratiquement achevée et lotie de plusieurs salles. Elle pourra donc accueillir les nombreux participants à la fête annuelle donnée en l'honneur de ce saint. C'est une vaste oeuvre qu'il a menée à bien jusqu'à son terme. Il me rappelle en souriant de mon implication dans la réalisation de cette bâtisse puisque lors de mon dernier passage j'y avais laissé par amitié quelques deniers de ma poche.
Je suis ravi de voir et de savoir que ce lieu réunira à l'avenir des centaines de gens dans de meilleures conditions pour préparer, organiser, manger le couscous communautaire et bien sûr danser.
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15 septembre 2010
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Mon quatrième retour en Kabylie (20)
Aït Chellala, que voici sous un autre angle, dernier village à la suite de Aït Abdelkrim, campe majestueusement sur son promontoire.
Idéalement placé pour une vision panoramique à plus de 180°, il permet de distinguer d'un côté le Djurdjura et la plaine des Ouadhias, de l'autre le secteur de Béni-Douala, Taguemount-Azzouz jusqu'aux limites plus lointaines de Larbaa Nath Iraten (ex Fort-National).
Plusieurs de mes anciens élèves sont issus de ce village, ainsi Mouloud L. et Smaïl L.
Leur nom portant la même initiale, je vous dois une explication. En 1896, l'administration coloniale décida de changer arbitrairement les patronymes des villageois. La raison invoquée était de faciliter le comptage des habitants et de mieux les localiser mais en réalité c'était pour les ficher afin de mieux les contrôler et d'intervenir en cas de rébellion. Chaque village se verra donc attribuer une lettre pour désigner les familles : ainsi la lettre O pour Tiki-Ouecht comme Ouali, Oubarèche et la lettre L poour Aït Chellala comme Lami, Latrous.
Smaïl L. que l'on voit ici près d'un vieux pressoir à huile est un sacré bonhomme dont il me tarde de vous parler dans le prochain épisode.
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14 septembre 2010
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Mon quatrième retour en Kabylie (19)
De la place au bout de la piste, voici une vue de Tiki-Ouecht, l'un des 8 villages de la commune des Ouadhias.
Ce village m'avait impressionné à mon arrivée chez les Pères. Petit par sa taille, il avait été réduit presqu'à néant par l'armée coloniale suite à des exactions et rebellions des autochtones. Les quelques maisons qui restaient debout offraient un contraste saisissant avec les ruines d'un passé récent.
Les enfants de ce village qui furent mes élèves étaient tout aussi épanouis que les autres. Il en est sorti, parmi d'autres, un facteur, un employé de mairie et certainement le plus connu à l'heure actuelle puisqu'il est le premier adjoint de l'APC (mairie). Smaïl (l'homme à moustaches), fumeur invétéré, semble être très apprécié, notamment des jeunes, par l'écoute qu'il leur réserve, le sens de l'organisation, la motivation pour un meilleur bien-vivre pour ses administrés. Sa tâche n'est pas facile parce qu'il faut savoir que les prérogatives des responsables d'APC en Algérie sont pratiquement inexistantes.
Je veux lui rendre hommage ici parce que je sais qu'il fait de son mieux. Continue cher ami à servir comme moi j'ai servi au temps où je fus ton instituteur.
Et maintenant voici tout au fond un autre village, Aït Chellala, dont je vous parlerai la prochaine fois.
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12 septembre 2010
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Mon quatrième retour en Kabylie (18)
A l'approche de Tiki-Ouecht, selon l'orientation, nous avons une vue imprenable sur l'agawa (Kabylie intérieure de moyenne altitude).
Je ne me lassais pas de regarder dans les années 70 ces beaux paysages que je découvrais (pour la plupart) chaque matin en ouvrant les volets de ma chambre.
Dommage que la visibilité cette fois-ci n'était pas au rendez-vous.
Voici le secteur de Taguemount-Azzouz et Tizi-Hibel
le secteur de Larbaa Nath Iraten (ex Fort-National) et Aït Yenni
le secteur des Aït Yenni
Croyez-moi, gens de Kabylie, vous avez des paysages enchanteurs, c'est un Breton qui vous le dit.
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11 septembre 2010
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Mon quatrième retour en Kabylie (17)
Sur le chemin de crête qui mène de Tighilt au village de Tiki-Ouecht,
on peut encore voir par-ci par-là des sentes muletières au passé glorieux.
Elles gardent en mémoire les pas, les effluves et la sueur des usagers et des animaux dont l'âne n'est pas le moindre représentant.
A une certaine époque, aghyul (l'âne) était le maillon indispensable à la subsistance des montagnards kabyles. Aujourd'hui encore, dans cette région au relief accidenté, il remplace avantageusement le tracteur ou toute autre machine.
Je me souviendrai de Mr Rekhis, un aveugle d'Aït Abdelkrim, qui allait, pour le vendre, chercher du sable à la rivière en s'accrochant à la queue de son âne. Sans cet animal précieux, l'homme n'eut pu faire vivre sa famille dont j'ai eu deux fils comme élèves.
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